Paris s’étend à mes pieds. Les bruits courent, rumeurs folles et s’étendent en mille et unes pépites de rires et de lumière. Le sourire gras du garçon de café dans mon décolleté ne me touche même pas, rien ne saurait mieux me combler que ce café allongé et cette cigarette, fumée du bout des lèvres.

 
Un livre, la moiteur de la capitale étreignant les pavés, la folie de la ville animée. Le monde devrait se résumer à cette terrasse, à cette phrase: « Un café pour la demoiselle? Ca fait longtemps qu’on ne vous a pas vu ! » Et les bruits des couverts qui s’entrechoquent, symphonie de l’activité fourmilière comme une révolte à la société buvant la tasse.

 

Rien ne me détache de ce bonheur, superficiel, soit, mais si doux. Qui y’a t-‘il de plus beau que ce bus au petit matin, sonnant les vêpres de la cité encore endormie ?
Les langages qui s’emmêlent, les cascades de bavardages qui meublent et accompagnent le vrombissement de la circulation. J’ai appris à être heureuse. Comme on apprend à marcher. Pas à pas, chute par chute. Doucement. Mais sûrement.

 

Paris, Paris ville lumière, Paris qui s’enflamme, Paris qui s’empoigne. La porte d’un café qui grince laissant sortir en trombe un serveur les bras chargés de café serrés et de verre d’eau Château La Pompe. Le murmure du percolateur, « Et un cappucino, un! ». Le prix exorbitant de ces cafés parisiens en font même leur charme.

 

Je pense à vous, à vos vies, pressées, hâtives. Ouvre grands les pupilles, même le métro est de toute beauté. J’aimerais vous parler, vous transmettre le bonheur immense qui s’empare de moi. A toi, grand-père chauve assis en terrasse. A ton ventre rebondi que tu glisses sous la table ronde.

Prendre le temps, prendre le temps de vivre et d’aimer. Et de s’aimer. Prendre le temps de courir et de voir s’étaler devant moi le long Boulevard d’Algérie. Prendre le temps d’effleurer une main rapidement. Prendre le temps d’un verre de Pouilly fumé, et d’écouter le vacarme des nuits parisiennes. Prendre le temps de rentrer chez soi par les premiers métros et de voir le jour se lever, entraîner avec lui les brumes de sommeil qui collent aux trottoirs.

 

Paris est une dame. Et je ne suis pas la première à vous le dire. C’est peut être pour cela que j’aime les femmes. Si Paris est une femme, et que j’aime Paris, alors j’aime les femmes. Jeune amour à la peau nue, les draps recouvrent ta poitrine comme le brouillard du matin la capitale. Les rumeurs de la cité sont les échos de tes soupirs et le parfum des lilas en fleurs, l’odeur qui habille ton corps. J’ai toujours aimé vos courbes, jeunes Lolitas, vos hanches qui ondulent entre les passants, Seine serpentant à travers la ville.

 

Je suis née des entrailles de ma mère, j’ai appris à vivre grâce à Paris. Les femmes ont façonné les époques, Paris brode les vies. La ville lumière se nourrit des espoirs et des désillusions des parisiens, mère de souvenirs, madonne citadine.

 
 

Ecrit au Rivolux, Paris