Traversant la ville qui lui a donné son nom, Chicago river est l’un des complexes fluviales urbain les plus façonnés par l’homme. Au cours du XIXème siècle, alors que la ville est en plein essor industriel, la Chicago river était surnommée «the stinking river» (la rivière puante) car l’ensemble des industries y déversaient leurs eaux usées. Suite à de graves problèmes sanitaires, les autorités se sont rendus compte que cette eau sale se jetait directement dans le lac Michigan, qui était alors la principale source d’eau potable de la ville. Pour lutter contre ce phénomène, on décida de créer des canaux et des écluses pour inverser le sens du flux de la rivière afin de protéger les eaux du lac de la pollution.
La réputation polluée de la Chicago river lui est encore attribuée aujourd’hui, même si depuis le début du XXIème siècle des efforts ont été faits par les industries et les habitants pour réduire cette source de pollution. La cause est simple : l’artificialité de ses canaux, avec des parois en aciers et des fonds boueux, a empêché la faune et la flore de s’y développer. Pourtant, ces dernières sont indispensables pour la filtration naturelle de l’eau. Un constat qui a poussé les habitants et les autorités à initier le projet Wild Mile (Les 1,6 kms sauvages), ayant pour but de créer un éco-parc sur les rives de la Chicago River.
Recréer des lieux d’habitats pour accueillir à nouveau les espèces
C’est l’agence d’Architecture SOM (Skidmore, Owings and Merrill) qui depuis 2017 a pris en charge l’aménagement de ces 7 hectares de bords de rivière. En réfléchissant à la manière de réintroduire des espèces végétales et animales, l’équipe a développé des solutions pour créer des habitats naturels pour ces espèces. Pour cela, tout au long de la rivière, a été disposé une multitude de petites îles flottantes venant se greffer aux berges. Ainsi, ces ensembles naturels viennent favoriser le développement d’écosystèmes fauniques et floristiques qui permettent naturellement d’assainir l’eau des canaux.
Les bords des canaux de la Chicago River sont peu à peu replantés – Unsplash
En plus de l’intégration des problématiques écologiques dans le projet, l’agence d’architecture SOM a également souhaité recréer un lien entre les habitants et leur patrimoine fluvial. C’est donc un ensemble d’usages qui a été pensé : de promenades piétonnes au renouveau de la pratique du kayak sur la rivière, les berges sont ainsi peu à peu rendues à la population locale. Des passerelles piétonnes ont également été imaginées pour favoriser les liens entre les différents quartiers de la ville. Une première phase d’aménagements a été lancée en 2017, et la finalisation du parc est projetée pour 2020.
Un projet qui s’appuie sur une participation citoyenne
Le commencement des travaux a pu être réalisé grâce à un financement participatif. Sur la plateforme Kickstarter, 63 000 dollars ont été collectés inscrivant alors le projet dans une dimension sociétale. Des entreprises ont également participé au financement du projet et ont ainsi aussi permis la réussite du projet.
Les habitants ont également été impliqués de manière bien plus insolite, puisqu’un ensemble de volontaires ont été recrutés et intégrés pour participer à la réalisation d’un inventaire et d’une surveillance quasi-quotidienne de l’ensemble des espèces présentes sur les bords de la Chicago River. Ces scientifiques citoyens réalisent donc une série d’observations sur le développement de la faune et flore : la récolte de ces données sur l’application The Wild Mile, créée spécialement pour le projet, permet à la fois de suivre l’évolution de la dépollution des sites mais également de prévenir les invasions et épidémies impactant les espèces. Ainsi, grâce à cette surveillance participative, les autorités ont pu éviter la propagation d’une épidémie de botulisme aviaire (causant la mort d’oiseaux) détectée sur le site.
The Wild Mile a donc réussi à créer une véritable communauté autour des questions d’écologie urbaine, qui chaque jour participe à la reconquête de la Chicago river. Ce projet s’inscrit donc dans une dynamique globale, celle d’améliorer la réimplantation d’espèces végétales et animales en ville, malheureusement disparues depuis l’industrialisation de nos espaces urbains, et de revaloriser aussi la présence de l’eau essentielle pour répondre à divers enjeux liés au changement climatique. De nombreuses villes proposent déjà à leurs habitants de se rafraîchir dans les cours d’eaux qui les traversent : à Zurich, en Suisse, la ville a ainsi aménagé 400 mètres de plage qui donnent sur le canal de la Limmat, ou encore plus proche de chez nous avec le bassin de la villette à Paris où une piscine flottante ouvre ses portes depuis 2 étés.
Zurich dispose de 30 zones de baignade en bordure de lac ou de rivière et 20 piscines en plein air. ©Roland zh sur wikicommon
De bon augure lorsque l’on voit, chaque année en été, les températures augmenter dans nos villes !