Certaines structures l’ont bien compris et intègrent durablement ces derniers dans leurs réflexions et missions. Rencontre avec Adélaïde Boëlle et Camille Ducros, respectivement fondatrice et chargée de mission au sein de l’agence Architecture in vivo, qui travaillent depuis plusieurs années au côté des plus jeunes pour co-construire la ville de demain.

Si les actions destinées aux enfants font partie de ce qui vous distingue de nombreuses autres agences, vos missions couvrent un champ bien plus large. Pouvez-vous nous présenter ces différentes expertises ? La participation des jeunes publics est-elle intégrée à chacune d’entre elles ? Ce travail a-t-il constitué le point de départ de votre agence, ou est-il apparu plus tard ?

A.Boëlle

En 2010, lorsque j’ai obtenu mon diplôme d’ENSA (École Nationale Supérieure d’Architecture) à Grenoble, j’ai ressenti le besoin pressant de me reconnecter au terrain, de travailler directement avec les usagers plutôt qu’au sein d’une maîtrise d’œuvre. J’ai donc décidé de me former, pendant une année de service civique, à la participation citoyenne. Je me suis rapidement investie dans l’animation des ateliers “rêve ta ville”, des temps de sensibilisation à l’architecture et à l’urbanisme, destinés aux enfants du quartier de la Villeneuve à Grenoble. Comme beaucoup, je n’avais pas identifié les enfants comme potentiels acteurs de la ville, comme réels participants à sa fabrication. Pourtant, ce sont bien eux qui m’ont fait visiter leur quartier, arpenter les rues, à travers leurs yeux et leurs vécus.

Cette approche sensible, de terrain et de rencontres, représente aujourd’hui le point de départ et l’élément fondateur d’Architecture In Vivo. Il s’agit à la fois de permettre à l’ensemble des habitants et habitantes d’un territoire de mieux l’appréhender et de participer activement à sa transformation, mais aussi de questionner la place actuelle des enfants et des jeunes dans l’espace urbain. Nous menons, pour cela, deux différents types de missions. Dans un premier temps, nous réalisons des études  participatives dont l’objectif consiste à venir mobiliser la maîtrise d’usage de chaque partie prenante afin d’assurer la co-construction d’un projet. Nous mettons également en place des actions pédagogiques, des interventions dans des classes d’écoles, de collèges et de lycées dans le but de sensibiliser les élèves à la fabrique urbaine.

“Mon espace public rêvé” à Chirens © Architecture In Vivo

« Mon espace public rêvé » à Chirens © Architecture In Vivo

Et c’est ce double prisme qui est passionnant avec les jeunes publics. Il est tout aussi important de les sensibiliser, de les éveiller, de leur transmettre des notions qui leur permettront de grandir avec un regard avisé sur leur cadre de vie, que de les concerter, en recueillant leur expertise d’usage et en les intégrant aux dynamiques de projet. Les enfants possèdent une vision neutre de solutions techniques, d’idées préconçues sur la ville. Ils ont cette capacité à prioriser, différemment des adultes, des enjeux et des thématiques. Par conséquent, cela nous paraît essentiel d’écouter leur parole et de légitimer leur participation dans l’évolution de nos territoires.”

Les effets du tout-voiture, de l’étalement urbain et de la périurbanisation, de la résidentialisation ou encore du manque de sécurité entraînent bien souvent une vision négative des villes, étant de plus en plus perçues comme hostiles aux enfants. Les équipes de maîtrise d’ouvrage et de maîtrise d’œuvre dont vous faites partie partagent-elles ce constat et sont-elles particulièrement sensibles à ces enjeux ?

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