Zorica Matic est la fondatrice de l’Association des Idées Lumières qui a pour objet de développer et promouvoir la dimension culturelle du sujet « Lumière ». Pour elle, « la lumière est un langage universel, le liant et le lien social », mais aujourd’hui, façonne-t-elle réellement nos villes ? Zorica Matic nous accompagne dans cette réflexion.
Au fond de sa grotte, l’Homme de Néandertal a d’abord inventé le feu, source de lumière. En répondant à ce besoin primaire, la lumière devient ensuite un enjeu du vivre ensemble. Pour des raisons de sécurité, nous avons d’ailleurs commencé à éclairer l’espace public. A partir du XVIIe siècle, Nicolas de la Reynie, lieutenant de police, installe des lanternes à chaque coin de rue pour renforcer la surveillance de Paris. Depuis la fin des années 80, l’éclairage public a pris une dimension événementielle et spectaculaire, impulsée avec la première intervention de Roger Narboni à Lyon.
Aujourd’hui, la lumière dans l’espace public est devenue « naturelle ». On ne se pose plus souvent la question de sa nécessité, de sa présence ni de son rôle. La lumière est là.
Mais à bien des égards, elle conditionne la structure urbaine, nos pratiques, nos capacités d’usage et nos perceptions de l’espace car elle communique directement avec notre part sensible. Nous vivons encore tous en fonction de la lumière.
Si l’accès à la lumière naturelle est gratuit et illimité, l’accès à la lumière artificielle a un coût et un impact sur la ville. Tous les territoires ne sont donc pas alimentés de façon égale. Les choix et contraintes d’implantation sont éminemment politiques et économiques au sens où elles induisent des comportements divers.
Enfin, si l’on parle de la lumière, nous devons forcément parler de la nuit. Elle constitue 50 % du temps en France. Une portion temporelle non négligeable, dont la présence conditionne fortement nos pratiques et notre empreinte dans la structure urbaine.
La lumière : source naturelle d’émotions, révélatrice des sens
Commençons par l’essentiel, la lumière est avant tout un besoin physiologique. Sans lumière nous mourrons. Son absence supprime toute conscience d’une partie de notre environnement, et nous désarme. Nous perdons la maîtrise de l’espace. Un lâcher-prise qui met à mal notre besoin primaire de sécurité. La lumière constitue donc un besoin primaire selon deux aspects. Elle permet à notre organisme d’être alimenté en vitamines, mais elle assure également notre visibilité et donc notre survie.
La lumière, par sa présence ou son absence, génère en nous des sentiments. Selon le degré de perception qu’elle nous offre, elle ouvre une palette de sentiments. En ville, la rue, sombre, fait peur…
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