Être confiné consiste à se priver d’un élément de soi. La marche mais aussi la rencontre de l’extérieur. Celui qui est à l’intérieur comme celui qui est à l’extérieur se retrouve seul face à lui. Bien que cette expérience soit plus facile pour celui qui dispose d’un lieu où habiter, elle reste anormale. Celui qui est chez lui peut se libérer et créer le monde d’après tourné vers un extérieur plus inclusif.
En étant confiné, l’expérience montre que Habiter c’est « entrer et sortir » comme l’exprime le philosophe Bernard Salignon dans « Qu’est-ce qu’Habiter ? » ( Qu’est ce qu’Habiter, Bernard Salignon, édition de la Villette, Juin 2010).
Être privé de la possibilité de sortir, c’est s’enfermer dans une tombe et être privé de la possibilité d’entrer comme c’est le cas pour des sans-abris ou des migrants, c’est l’impossibilité de s’intégrer à la ville. Le confinement aboutit à une expérience douloureuse, tant pour ceux qui se retrouvent prisonniers de leur logement, mais également tant pour ceux qui en sont privés et qui montrent leur désintégration ou in-intégration à la ville.
Toutefois, le confinement conduit à une expérience intéressante pour celui qui est « assigné à résidence » et livré à lui-même. Cette expérience de retour sur soi amène l’individu à développer quelque chose. Apprendre, écrire, chanter, faire du sport enfermé. Une vraie liberté. Une liberté qui ne fuit pas. Un temps maîtrisé et pas un temps qui se subit. L’Homme n’échappe plus au temps, il vit le temps. Il profite de chaque heure. Le marcheur s’arrête et ne gaspille pas. Il fait.
En conclusion, limiter, contraindre est indispensable et conduit à une créativité. En effet, pour sortir du confinement abstraitement, la liberté trouve un chemin. Ce temps permet d’imaginer une société différente comme à la nature de se reposer. Cette créativité ne demeure possible que si le logement est choisi et approprié par celui qui le vit. Résoudre la crise du logement, ce n’est pas uniquement donner un logement à chacun, c’est choisir le lieu où Habiter. Le départ de nombreux franciliens vers la province avant que ne commence le confinement, ou la difficulté dans certains quartiers populaires à respecter le confinement, montre que certains territoires ne vivent pas bien et que leurs habitants rêvent d’ailleurs. L’expérience d’après doit interroger urbanistes, politiques et architectes sur la fabrication de logements qui permettent de vivre mieux de telles périodes. Peut-être devrons-nous détruire l’intérieur des logements pour rendre plus désirable cet habitat et vivre autrement le confinement ? Mettre en ruine le bâti existant sans le détruire et inventer une nouvelle manière d’Habiter ?