guillemets-ouvrantLes épreuves de philosophie se sont déroulées mercredi dernier. Des milliers d’élèves de terminale ont planché durant quatre heures.

Trois sujets au choix, dont deux de dissertation.
Nous avons proposé à nos contributeurs de plancher sur le sujet de leur choix, parmi les sujets tombés le jour J.
Une seule consigne : L’urbain comme seul prisme !

 
 

Voici la « copie » rendue par Rebecca Armstrong, qui a traité le sujet donné aux élèves de Terminale L :
 
« Suis-je ce que mon passé a fait de moi ? »

 
 

philo
 

Je suis une ville.
Un entrelas de bitume, parfois en-dessous survivent quelques derniers pavés. Jadis j’étais la réunion de quelques âmes, paysannes surtout, j’étais là pour les champs, les bois qui me nourrissaient. Univers en devenir j’ai attiré d’autres. Avec les ruelles, les chemins, les voies, les artères, j’ai grandi sans cesse. Ils ont fait de moi des hameaux, des quartiers. Ici une langue, là un métier. Je me reproduisais, m’étendant plus vaste. Je gardais des espaces de respiration, des places dont le souffle irriguait les allées et venues de ces êtres criant, courant, jouant, bâtissant, travaillant, apprenant. J’ai grandi encore. Et les architectes de vouloir devenir mes maîtres, me dessiner. Je suis devenue page blanche, règles, tés. Et les notables de vouloir devenir mes maîtres, m’organiser. Là où je respirais ils se sont installés. Et les enfants de vouloir se jouer de moi, empruntant les chemins qu’ils ouvraient à leurs pieds. Et la ville étais-je devenue. Engorgée, découpée, oubliés les champs, les bois.

 

Mon passé n’a rien fait de moi, c’est votre présent qui me fait à chaque instant. Je suis une ville, d’ici ou d’ailleurs. Les traces de l’histoire sont cachées sous les pas incessants.
Aujourd’hui, certains appellent à mon identité, à mon histoire. N’ont-ils pas vu de leurs promontoires que moi la ville je n’ai pour identité et histoire que celles de ceux qui m’habitent ? N’ont-ils pas vu que tout est là devant eux, vivant, tumultueux, enragés aussi parfois ? Ma sève, mon sang est dans les rues, les places occupées, dans les constructions qu’ils ont érigé, applaudi, haï, trahi. Je n’ai ni passé moi la ville, ni avenir moi la ville. Je ne suis pas, vous êtes.

 

Vous voulez me faire durable, vous voulez que la nature revienne à moi, vous voulez que je sois résiliente, vous voulez que je sois connectée, vous voulez que je sois intégrée, vous voulez que je sois diversité. Je ne suis pas, vous êtes. Je ne suis que matière, éléments, espaces, vides et pleins. Je n’ai ni passé moi la ville, ni avenir moi la ville. Je ne suis pas, vous êtes.