Au Japon, les villes de banlieues connaissent une problématique contemporaine commune liée à l’homogénéisation de l’espace urbain qui laisse peu d’espaces favorables au contact et à l’échange, participant ainsi à l’accentuation du délitement des liens sociaux. Le manque de commerces de proximité et l’usage de la voiture prépondérant dans les banlieues japonaises ont des conséquences sur le milieu de vie des habitants qui se retrouve dépourvu d’espaces publics et de lieux de rencontre. Ce constat est en partie dû à la monopolisation de l’espace urbain par les stationnements de voitures, et au manque d’opportunités pour les habitants, ayant peu recours aux transports publics, de se croiser. Ces aménagements ont ainsi participé depuis longtemps a un recul des liens communautaires.
Pour répondre à cet enjeu et trouver un début de solution, un barbier de la ville d’Ichikawamisato, une ville d’environ 16 000 habitants dans la préfecture de Yamanashi, décide d’étendre sa boutique sur une partie du parking et d’ouvrir ce nouvel espace de 23 m² aux visiteurs. Ces derniers peuvent alors s’asseoir et discuter sur une terrasse en bois, aménagée de houillères pour les plantes, à proximité de deux légères zones de creusement. L’une accueille des bancs collectifs menant à la discussion et l’autre, vide, invite à la rencontre et laisse aux visiteurs la possibilité de s’asseoir directement sur la terrasse.
Cette idée a été menée par l’architecte Jorge Almázan et ses étudiants de la Keio University Architecture Laboratory avec un budget serré, mais qui a tout de même permis de revaloriser le salon de coiffure et d’attirer une nouvelle clientèle, tout en réanimant un commerce de proximité et l’espace urbain dans lequel la terrasse s’est implantée. Pour encourager la participation et l’esprit de communauté, la plantation de la terrasse a été ouverte aux habitants du quartier sous la forme d’un atelier. D’après l’architecte, l’acte de planter favorise la diversité des usages et participe à créer des frontières douces entre les différentes zones de la terrasse.
Cet aménagement, entre privé et public, rend aux visiteurs un espace jusqu’alors aseptisé par une vaste étendue de places de parking principalement dédiée aux véhicules. Désormais, ils peuvent aller chez leur coiffeur tout en ayant la possibilité de pratiquer l’espace urbain environnant autrement que par la voiture. Par exemple, la sortie chez le coiffeur ne se limite plus à cette fonction mais se transforme en une sortie plus large où il est possible, au même endroit, de profiter du reste de la journée avec des amis, ou même de déjeuner avec son coiffeur. Une pratique originale pour redynamiser des commerces de proximité comme des supérettes, ranimer des espaces publics inutilisés et surtout resserrer le lien social des petites villes en perte de vitesse. Une initiative qui pourrait, couplée à d’autres mesures, inspirer ces acteurs locaux afin d’attirer plus de visiteurs.
Vue de l’extension terrasse du salon de coiffure et de son insertion dans l’environnement
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