Depuis une dizaine d’années, le 3ème lundi de Janvier, appelé “Blue monday”, est défini comme le jour le plus déprimant de l’année. Entre nostalgie de la période des fêtes loin du réconfort familial, le mauvais temps dehors, les dettes financières qu’a engendré Noël, et bien souvent l’arrêt des bonnes résolutions prises pendant le changement d’année, c’est la combinaison de l’ensemble de ces critères qui a donné l’idée à une agence de voyage d’en faire un coup marketing : quoi de mieux pour lutter contre la déprim’ que de partir en vacances ?
Même si tout cela n’est pas très scientifique, il est vrai que la période hivernale a tendance à nous rendre plus sensibles aux “coups de mou”, et il semblerait que la ville ne soit pas si innocente dans nos changements d’humeurs.
Quand la ville nous pousse à la déprime
Depuis la création des premières villes jusqu’au développement des métropoles d’aujourd’hui, les liens entre le contexte urbain et l’état psychique de ses habitants ont toujours intéressé auteurs, artistes et scientifiques. À travers différentes études, tous cherchent à savoir si les urbains sont plus déprimés que les ruraux, ou encore si la ville nous rend plus sensibles et irritables…
Même si aucun lien scientifique n’a encore été établi, les dernières recherches sont unanimes : le contexte urbain a un impact sur l’humeur de ses habitants, et pousseraient certains à adopter plus rapidement des comportements dépressifs. Des faits qu’une étude menée par le département de psychologie de Stanford a tenté de quantifier, en comparant les effets sur le psychisme d’une vingtaine de sujets lors d’une promenade en ville à une promenade en pleine campagne. Résultats : en ville, il y aurait 20% de risques supplémentaires de contracter des troubles de l’anxiété et 40% de risques supplémentaires de développer des troubles d’humeur.
Des résultats pas si surprenant lorsqu’on s’intéresse aux causes : la ville est un regroupement d’activités, d’humains, d’échanges, qui font d’elle un lieu singulier et vivant, mais aussi un lieu d’hyperstimulation. L’activité humaine a amené avec elle du bruit, de la pollution, du trafic, un isolement social où l’on se côtoie sans se connaître réellement… L’ensemble de ces critères combinés peut, très vite, être saturant au quotidien pour l’esprit humain, qui peine à se reposer et se relaxer dans un espace où le calme n’existe pratiquement pas. En effet, plusieurs recherches ont permis de souligner que la présence d’espaces naturels ou verts influence grandement le bien-être mental. Des espaces qui se font malheureusement rares dans nos villes…
Les villes seraient donc responsables en partie de notre état dépressif. Pourtant, certaines études vont dans le sens inverse. C’est le cas d’une étude, “Le bonheur est dans la ville”, menée par l’Ipsos en 2013, dans laquelle 9 habitants interrogés sur 10 ont stipulé être heureux d’habiter au sein d’une grande ville. Mais alors, si nous aimons vivre en ville, comment empêcher cette dernière de nous déprimer ? Il semblerait que certaines villes aient trouvé la bonne recette !
Quand les villes du nord montrent l’exemple du bien-être urbain
Copenhague, capitale du Danemark, est réputée pour être une des villes où les habitants sont les plus heureux. Pas étonnant pour la plus grande ville d’un pays élu champion du monde du bonheur par l’ONU en 2012, 2013 et en 2016. Oslo, capitale de la Norvège, est quant à elle, désignée dans le dernier “World Happiness Report” comme la ville où les gens sont les plus heureux d’Europe. Il semblerait que les villes du nord de l’Europe rendent particulièrement heureux leurs habitants. Étonnant pour des villes où l’hiver est particulièrement rigoureux et où les nuits peuvent durer plus de 16 heures. Mais alors, qu’est-ce qui fait que les gens s’y épanouissent ?
Que ce soit Olso ou Copenhague, ces villes sont le symbole du “vivre heureux nordique”. Copenhague est d’ailleurs le symbole du Hygge, cet art de vivre danois pouvant se traduire par le terme “cosy” ou encore “chaleureux” : au programme, de longues après-midi emmitouflé dans des plaids, le tout au coin du feu, profitant simplement des petites joies de la vie. Depuis toujours, la ville regorge de ces endroits chaleureux, typiques des villes du nord, qui permettent à tout un chacun de prendre le temps de profiter d’un temps de calme dans une atmosphère cosy. Que ce soient des cafés, des musées ou des lieux d’éducation, le Hygge est de mise !
En plus de ces espaces de détente, ces villes sont pionnières en matière de mobilités douces ou de développement durable. Il s’agit en effet de villes apaisées, où les véhicules motorisés ont une place réduite et où les nuisances sonores sont amoindries par le succès du vélo. Oslo a d’ailleurs quasiment exclu la voiture de son centre-ville, laissant une grande place aux modes de déplacement doux, aux usagers et aux commerces. Résultat ? Des habitants plus détendus, plus actifs, moins déprimés.
Elles accordent également une plus grande place à la nature, dont les bénéfices pour la santé mentale et psychique ne sont plus à prouver. De larges parcs urbains y sont fortement appréciés, et la nature est présente quasiment dans chaque rue avec des espaces fleuris et arborés devant les maisons et les immeubles, dont il est possible de profiter en tant que piétons.
Un art de vivre mêlé des aménagements urbains qui favorisent donc le développement de la sensation de bien-être chez les habitants. En France, les logiques ne sont pas les mêmes, mais certains lieux commencent à voir le jour et à apporter un peu de Hygge chez nous. C’est le cas des tiers-lieux, qui connaissent un important succès en France, et qui sont des espaces aux esthétiques proches de que l’on retrouve chez soi. On y passe souvent des après-midi entières, ce sont finalement des lieux où l’on prend le temps. Les espaces verts prennent aussi de plus en plus d’importance dans les villes, notamment sous la forme de jardins participatifs. Ces nouveaux espaces dédiés à la culture de légumes en ville participent activement au bonheur des citadins, le jardinage étant une des activités les plus relaxantes !
En plus de ces lieux atypiques qui peuvent apporter un peu de chaleur en ville, certaines associations, habitants, start-up développent aussi des initiatives qui cherchent à donner le sourire aux habitants des villes !
Micro-initiatives, quand la ville apporte du réconfort !
Si vous vous promenez dans le 13ème arrondissement de Paris, vous avez beaucoup de chance de croiser l’un de la dizaine de nounours qui ont pris leur quartier dans les Gobelins. Assis sur un banc, en terrasse de quartier, ou saluant les passants depuis des appartements, ces ours sont l’idée d’un commerçant libraire du quartier. Derrière ce geste, aucun intérêt commercial, mais juste une envie, celle d’apporter un peu d’amour et de mignonnerie dans les rues de la capitale ! Un succès qui même un an et demi ans après leur apparition se fait toujours ressentir. Les nounours des Gobelins, dont les aventures sont visibles sur les réseaux sociaux, attirent toujours plus de curieux et de touristes.
Certaines collectivités prennent également les devants pour amener un peu de bonheur à leurs usagers en utilisant le nudge dans leurs aménagements urbains. À Lyon, la société de transport à choisi de coller sur les marches de métros des messages d’encouragement pour inciter les usagers à privilégier les escaliers aux ascenseurs.
C’est également le cas de la ville de Besançon qui, pour inciter ses habitants à ne pas jeter leur chewing-gum par terre, a installé des cibles au dessus des poubelles publiques ! De quoi allier écologie et jeu, et ainsi amener le sourire sur les visages des bisontins.
Mais le nudge n’est pas l’unique moyen de redonner le sourire en ville, certaines villes investissent dans du mobilier urbain qui offre confort et réconfort dans les rues. C’est le cas d’Oslo, qui dans son plan de réduction de la place de la voiture, a choisi de transformer les parcmètres, devenus inutiles sans la présence de voiture, en station haut-parleur, diffusant de la musique : la route s’est quant à elle transformée en piste de danse. Cette installation, appelée Shall we Dance, réactive l’usage sur l’espace public, pour que les piétons se réapproprient les rues anciennement dédiées à la voiture.
Il est donc facile d’amener un peu de réconfort, de bienveillance, de mignonnerie dans les villes sans forcément investir énormément, mais en favorisant les micro-initiatives qui ont un impact maximum sur leur environnement. Rendre la ville plus joyeuse, c’est passe peut-être par le fait de laisser ses habitants l’investir, se l’approprier et œuvrer pour la rendre plus vivante !
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