La révolution numérique n’a pas épargné ce domaine, faisant entrer le street art dans une toute nouvelle ère, celle du digital et de la réalité virtuelle. D’autres technologies peuvent influencer l’art urbain, comme le développement de la scénographie lumineuse et des installations LED. Alors, les pixels sont-ils en voie de remplacer les bombes de peinture ? Comment va-t-il s’approprier l’arrivée d’innovations technologies et techniques et à quoi ressemblera le street art de demain ? En quoi cela pourrait-il faire émerger de nouveaux artistes et permettre au street art d’élargir ses horizons ?

Vers une digitalisation des œuvres pour des musées 2.0

Étant éphémères, les traces du street art sont précieuses et l’heure du numérique a fait apparaître un super pouvoir, celui de les conserver. L’art de la rue est parfois caché, difficile à trouver, c’est pourquoi internet s’est avéré être le lieu idéal pour le partager au plus grand nombre, de manière internationale et gratuite. Parfait espace de diffusion, le web a été rapidement investi par les street artistes eux-mêmes, créant de véritables galeries numériques pour leurs fresques ou leurs collectifs. Des médias ou associations spécialisés dans le domaine ont aussi créé des sites internet dédiés afin de rendre cet art toujours plus grand public. D’ailleurs, Instagram n’est-il pas une immense bibliothèque numérique de street art ? Participant à la renommée de cet art si particulier, le réseau social est devenu une galerie géante sans frontières qui collectionne, en plus d’autres photos, les œuvres des rues du monde entier. Les autres réseaux sociaux ont d’ailleurs rapidement investi le domaine avec la création de nombreux comptes spécialisés dans le relais d’œuvres découvertes dans l’espace public.

D’ailleurs, différentes applications numériques, similaires à des musées ou galeries 2.0 dédiées aux amateurs de street art, sont apparues. Elles permettent de donner davantage de visibilité et de clarté à l’art urbain, afin de toucher toujours plus de curieux. Ces cartes accessibles et souvent collaboratives peuvent recouvrir le monde entier, comme c’est le cas de Digital street art, Urbacolors ou Street art Cities, ou être plus locale comme My Paris Street Art. Elles donnent des alternatives aux réseaux sociaux pour la diffusion des œuvres et permettent à tous de contribuer à la mémoire de cet art éphémère.

En parallèle, des projets plus culturels et patrimoniaux ont vu le jour. Parmi les plus marquants, le cas de la Tour Paris 13 qui, condamnée à la destruction, proposa la création d’une galerie virtuelle en ligne. Les œuvres exposées durant l’existence du lieu ont été mises à disposition du public virtuellement, étage par étage, par une expérience digitale composée de différentes photos, testament du lieu aujourd’hui détruit. Il en fut de même avec les Magasins Généraux de Pantin qui pendant un an avant des travaux de réhabilitation ont été totalement numérisés par le propriétaire, l’agence de publicité BETC, afin de garder la trace du “patrimoine culturel” des nombreuses œuvres peintes dans le lieu abandonné jusqu’alors. Les 5 200 photos récoltées ont permis de recréer numériquement les fresques dans une expérience en ligne nommée Graffiti Général. Deux exemples qui peuvent nous donner à penser que dans le futur les musées de street art seront très certainement aussi numériques.

L’émergence d’un street art numérique

Qui ne connaît pas aujourd’hui les gifs ? Véritable art issu d’internet et uniquement appréciable virtuellement, les street-artistes se sont emparés du phénomène en créant des animations dans leurs fresques grâce à des séries de timelapses photographiques. C’est ainsi que naquit le «gif-itis» ! Inventé par INSA, artiste londonien, d’autres artistes comme l’italien BLU tentent désormais l’aventure, mettant en scène leur composition graphique par le mouvement et jouant ainsi avec les possibilités d’animations qu’offre ce format.

Gif-itis créé par INSA ©Insa Gifiti


La démarche peut même aller plus loin car, plus qu’un support de diffusion, le numérique est également un nouvel espace de création. Le street art se réinvente donc en s’adonnant à ses expériences virtuelles. En janvier 2017, l’expérience parisienne du Black Supermarket proposait aux visiteurs de s’exprimer et de créer des fresques de street art via un logiciel. Le résultat était visible sur un GraffWall, un mur virtuel sur lequel il était possible de dessiner en direct via un projecteur.

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En couverture : L’un des baisers qui a illuminé les rues de Paris lors de la Nuit Blanche 2016  ©Julien Nonnon