En Seine-Saint-Denis se cache un projet peu médiatisé, celui du laboratoire écologique zéro déchet, dit LEØ, de Noisy-Le-Sec. Ouvert en septembre 2018, le projet a pris pied dans un bâtiment industriel de 1000 m² qui était fermé depuis une dizaine d’années. N’ayant pas eu de retour de la mairie, afin d’obtenir un accord d’occupation des locaux, l’expérience s’est tout de même construite sous la forme d’un squat.



Une enquête ethnographique menée par Igor Babou révèle la réussite d’un projet, loin des clichés des tiers-lieux pour les riches, monté par deux personnes animatrices sans ressources économiques. Celui-ci s’articule autour de quatre pôles d’activités organisés et ouverts le jeudi et le dimanche. Parmi ces pôles, on retrouve une AMAP (association pour le maintien d’une agriculture paysanne) qui s’est constitué un réseau consistant, un atelier d’auto-réparation pour donner une compétence en réparation sur des objets variés, mais aussi le pôle « la gratuiterie », un espace destiné aux objets dont ne veulent plus les habitants et qui sont donnés, pour être mis en rayon et à disposition des personnes qui en ont besoin. D’ailleurs, cette dernière activité a contribué au grand succès de ce laboratoire par la récolte de 2 tonnes de vêtements chez l’habitant. Enfin, une animation conviviale du lieu a aussi vu le jour, c’est la cuisine à prix libre où les boissons et les plats bio peuvent être achetés au prix de notre choix. Pour boucler la chaîne du zéro déchet, les aliments à consommer sont des invendus de magasins bio.




Photos de la cuisine libre au laboratoire écologique zéro déchet de Noisy-Le-Sec prises par Igor Babou via la page facebook



L’objectif de l’expérience est aussi de sensibiliser le public à l’environnement avec, notamment, un message qui dénonce la surconsommation et met en avant le coût du recyclage qui se répercute sur le budget de nos villes, et donc de nos factures. C’est aussi une bulle apaisante, un large espace de convivialité où il est possible de venir en famille, entre amis ou même avec son association, pour passer un bon moment ou plancher sur ses futurs projets. C’est ce qui en a fait le succès avec des visites régulières de 30 à 70 visiteurs par jour de résidents à la recherche d’un lieu de rencontre ouvert au débat.



Une autre observation constatée concerne le public qui fréquente les lieux. Celui-ci se démarque des lieux branchés fréquentés par une population aisée. Les visiteurs de LEØ sont d’abord des classes populaires ou des personnes issues de l’immigration qui ont peu de revenus et qui n’ont souvent pas pu accéder à des études. Ces habitants du quartier, également intéressés par l’écologie, se préoccupent de la réduction du gaspillage pour une consommation raisonnée pour manger plus sainement, tout en étant demandeurs de plus de solidarité et de lieux de rencontre pour créer du lien social ou avancer sur des projets associatifs.




Pourtant, ce tiers-lieu vivant est aujourd’hui menacé par un projet immobilier qui prévoit d’expulser ce lieu d’expérimentation, à première vue, réussi. Alors que l’opération immobilière n’a pas débuté, la surface sera probablement inutilisée pendant quelques années. Le manque de soutien de la part de la municipalité pour ce laboratoire, et de réponses par rapport aux besoins des habitants de pouvoir se retrouver, s’organiser et travailler ensemble sur les enjeux de leur quartier, notamment sous une forme associative, laisse perplexe. Actuellement fermé et en cours de déménagement, ce tiers-lieu n’en reste pas moins actif, comme en témoigne leur site et leur page facebook. On a hâte de voir comment ils vont rebondir !



Mise à jour : Bonne nouvelle ! LEØ vient de réouvrir ses portes le dimanche 6 janvier au 2 rue Lakanal à Pantin ! Pour plus d’information, suivez ce lien.


Photo du Laboratoire écologique Ø déchet à Noisy-Le-Sec, via Intersquat Paris et le site web LEØ



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