Quelle que soit leur taille, nos villes sont des foyers de culture. Par leur histoire et leur identité elles ont été, de façons diverses et variées et à leur échelle, témoins de l’évolution de la société et donc de la culture française. En 2019, le ministère de la culture fêtait ses 60 ans d’existence. Depuis sa création, les politiques culturelles nationales se sont vues considérablement évoluer et ce tout au long des gouvernements de la Vème République. 

Malgré cela, bien loin devant le budget étatique, les villes sont les premiers mécènes de la culture en France. Cette dernière est ainsi devenue indissociable du “projet de ville” comme le souligne la philosophe-architecte Chris Younès. 

Selon une étude menée par L’Observatoire des politiques culturelles en partenariat avec le ministère de la Culture, la part moyenne du budget « culture » est de 12,5 % dans les villes de plus de 100 000 habitants, du budget global. Ce chiffre reste stable voire bénéficie d’une légère augmentation d’année en année. La culture est ainsi un point d’attractivité important pour la ville et semble caractéristique de l’urbanité, de la culture urbaine. Elle qui favorise le lien social, l’attractivité d’un lieu, une ouverture intellectuelle, ainsi qu’une éducation commune, elle est un cheval de bataille immense pour les municipalités. 

Coup de projecteur sur…

POITIERS 

Préfecture du département de la Vienne, Poitiers compte une aire urbaine de 260 000 habitants. Depuis 2008, c’est un maire socialiste qui en occupe sa mairie. 

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Le « TAP » Théâtre Auditorium de Poitiers – Crédit photo ©Arthur Péquin via Wikipédia

Le moins que l’on puisse dire est que les intercommunalités sont très impliquées dans la mise en place de politiques culturelles de grande ampleur, comme le PACTE, Projet Artistique et Culturel en Territoire Éducatif. Cette mesure vise à répondre à des besoins spécifiques des élèves propres à chaque école ou établissement en matière d’éducation artistique et culturel. Le maire sortant Alain Claeys, avait lui aussi à cœur de faire évoluer l’accès à la culture par l’éducation, dans les écoles notamment. 

À Poitiers, la ville ne manque pourtant pas de culture. Lieu important du duché d’Aquitaine, l’histoire est encore très présente dans la ville. En 2019, le palais de justice hébergé dans l’historique Palais des comtes de Poitiers déménageait, laissant un vaste bâtiment vide à réinvestir. Les candidats aux municipales 2020 y vont chacun de leur idée pour donner une seconde vie à l’édifice du XIIème siècle…. 

Pour Alain Claeys, maire sortant issu d’un regroupement de la “gauche républicain et écologique”, il faut rendre plus visible la place de l’ancien palais de justice et réfléchir à un projet innovant qui puisse convenir à la réhabilitation de l’édifice. Pour lui, la culture doit être en deuxième place quant au budget de la ville, derrière l’éducation. Selon lui, Poitiers étant une ville jeune qui “recèle de nombreux talents”, il faut créer un lieu pour les pratiques artistiques émergentes localement et un autre “pour soutenir la filière musicale si riche à Poitiers.” 

Chez les anticapitalistes menés par Manon Labaye, l’ancien palais de justice doit être reconverti en un “musée international des luttes”. Et puisque la culture est un moyen de comprendre le monde et de s’en évader, il faut rendre gratuit l’accès aux médiathèques et aux musées. La candidate souhaite également la création d’ateliers-logements pour les artistes plasticiens dans l’habitat des bailleurs sociaux. 

A la République en Marche représentée par Anthony Brottier, la culture est à la fois un moyen efficace pour bien-vivre ensemble, pour développer la créativité et l’innovation sur le territoire, pour faire rayonner la ville touristiquement et valoriser le patrimoine culturel, ainsi qu’à redonner une véritable identité à la ville de Poitiers. 

Au Rassemblement National, le candidat Kévin Courtois propose quant à lui de développer les fêtes traditionnelles et bals populaires comme qu’il considère comme une façon de souder les quartiers et de rayonnement pour la ville. Riches d’une histoire particulièrement fournie, Kévin Courtois veut également faire subventionner les spectacles retraçant l’histoire de la ville.  

L’écologiste Christiane Fraysse en tête de la liste « Osons 2020», veut rompre définitivement avec une “politique culturelle de prestige tournée vers l’extérieur”. Selon elle, il est nécessaire de faire de la Culture un bien commun, accessible à tous et “d’œuvrer pour l’égalité femmes-hommes et la mixité dans les arts, la culture et la musique.”

LILLE 

À Lille, ville qui, rappelons-le, fut élue Capitale Européenne de la Culture en 2004 et remporte le titre de Capitale Mondiale du Design 2020 ; le parti socialiste détenteur des clefs du beffroi depuis trois mandats consécutifs, s’est efforcé de diversifier l’offre culturelle. Et ce particulièrement au cours du 3ème mandat de Martine Aubry, durant lequel la culture a été désignée comme “pilier de l’éducation” et “priorité politique”. 

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Le nouveau bâtiment du musée des Beaux-Arts de Lille – Crédit photo ©Jean-Pierre Dalbéra via Flickr

Parmi les 11 plus grandes villes de France, Lille arrive en 3ème position quant au budget alloué à la culture : l’offre d’équipement culturels existants est en effet déjà très vaste. Et pourtant, les programmes des candidats sont bien différents…

Martine Aubry, maire sortante a, cette année encore, plusieurs ambitions. Parmi son souhait de rénover le musée d’Histoire Naturelle de Lille, de transformer l’ancienne gare Saint-Sauveur en piscine olympique (projet ayant fait longuement polémique) et d’en installer une seconde non loin de l’ancienne usine Fives Cail. Elle désire aussi maintenir la gratuité des musées le dimanche pour les habitants de la métropole lilloise. Enfin, elle persiste dans son investissement dans l’éducation où elle veut “initier, d’ici 2026, 100 % des élèves de maternelle et primaire à l’art et à la culture”.

Stéphane Baly, candidat pour Europe Ecologie les Verts, propose quant à lui des mesures originales comme celle de supprimer la publicité de l’espace public en la remplaçant par des oeuvres d’art. Pour lui, la culture ne peut être promue sans recours au digital. Il souhaite donc instaurer un dispositif global d’éducation à l’image. Pour lui, point de piscine olympique à Saint-Sauveur. Il imagine plutôt une “coopérative artistique” gérée par divers acteurs. Il veut aussi permettre un accès facilité aux jeunes à la pratique artistique en étendant par exemple les horaires des bibliothèque en semaine. En plus du dimanche, les collections permanentes devraient être gratuites le samedi pour Stéphane Baly.

Du côté des Républicains, le candidat Marc-Philippe Daubresse met plutôt l’accent sur le sport, en encourageant les clubs sportifs locaux. Mais en ce qui concerne la culture, la priorité pour Daubresse n’est pas à l’innovation culturelle, mais d’abord à la protection “urgente” du patrimoine lillois bien en détresse. Pour lui, la politique culturelle doit être plus responsable et s’appuyer sur des associations locales lilloises.

Et puis pour Violette Spillebout à LREM, si elle veut offrir une chèque de 100€ pour l’inscription des petits lillois aux activités artistiques, elle imagine son programme de politique culturelle au-delà des frontières. Elle veut par exemple lancer une grande exposition d’envergure internationale, tous les deux ans, à Lille. Elle pense aussi au rayonnement international de la Métropole lilloise par le tourisme : elle souhaite rendre l’information culturelle multilingue pour encourager les touristes et visiteurs d’affaire étrangers.

Crédit photo de couverture ©paulfvrt via Pixabay