Le Carillon, pour ceux qui ne connaissent pas encore, est d’abordun réseau de commerçants solidaires proposant des services aux personnes sans domiciles fixes. Les services dont ils peuvent bénéficier sont affichés dans un petit guide par arrondissement ou directement sur les portes des commerçants du réseau sous forme de logos. Les sans-abris peuvent ainsi utiliser des toilettes, boire un café, charger leur téléphone ou même discuter avec les commerçants et les habitués et ainsi retrouver un peu de lien social. 

Le réseau réunit bien plus que les commerçants puisque des bénévoles et des anciens sans-abris organisent régulièrement des conférences, des événements et des sorties, à la fois pour les habitants du quartier et les sans domicile fixe. Une manière de recréer du lien social avec les citoyens et de démystifier l’exclusion, voire le statut même de SDF. Ainsi, l’association conseille les citoyens qui se sentent dépourvus et impuissants lorsqu’ils croisent des personnes à la rue.

Le numéro 0800.94.88.11, opérationnel depuis lundi, est ouvert du lundi au vendredi, de 10h à 13h et de 14h à 18h. Il permettra de pallier un problème auquel les institutions ne répondent pas en proposant un accompagnement permettant de rendre la vie de la rue un peu moins rude. Ainsi, pour ce numéro, il ne s’agit pas d’un service d’hébergement, ni de services d’assistance sociale comme le 115, mais d’un accompagnement pour les personnes sans logement, afin qu’elles puissent trouver un commerçant solidaire ou connaître les activités de l’association. Des premiers pas vers un accompagnement de plus longue durée. Pour faire connaître ce nouveau service, elle lance une campagne d’affiches avec la TBWA Corporate, une agence de communication.

Campagne du Carillon publié par France Bleu © Le Carillon et la TBWA Corporate

Les associations qui se développent telles que le Carillon, les Clochettes ou la Cloche à biscuits attestent d’un manque de politiques volontaristes quant à la situation des sans domicile fixe. D’après le journal Libération, le dernier recensement du nombre de sans domicile fixe n’a eu lieu qu’en 2012. L’INSEE comptait 141 500 SDF en France mais l’organisme n’a toujours pas prévu un recensement pour mettre à jour ce résultat.

Cette situation met aussi en avant un lien social fragilisé entre les personnes d’un même quartier et interroge sur le rôle de la ville à favoriser les solidarités. En effet, face à ces initiatives citoyennes positives, se dresse souvent des équipements urbains visant à interdire le stationnement des SDF dans l’espace public, invisibles à un passant pressé. Pourtant, la ville n’est pas capable de les loger, alors comment gère-t-on cette situation de rue tout en refusant qu’ils s’approprient l’espace public ?

Ces constats questionnent l’organisation de la ville en elle-même, vectrice ou non d’inégalités. La séparation bien distincte de la sphère privée et de la sphère publique participe à ce que l’espace public ne soit plus qu’un lieu de passage. Ainsi, la ville est encore loin de l’idéal des villes ludiques ou l’espace public nous invite à flâner, nous permettant d’échanger plus aisément avec les autres et où une logique spontanée de solidarité urbaine se révèle davantage. Par ailleurs, le commerce de proximité joue un rôle important dans cette logique. Pourtant, les grandes surfaces tendent à les remplacer et la diversité des activités se raréfie entraînant un appauvrissement de l’espace commun. Bien que les villes, conscientes du phénomène tentent de maintenir leurs commerces, elles n’y parviennent pas toujours faute de moyens.

À la manière de Jane Jacobs, première défenseur de la vie urbaine conviviale, les réseaux comme le Carillon constituent des alternatives complémentaires aux dispositifs de la ville, participant au maintien de la vie de quartier et à la lutte contre l’indifférence globale.

Quartier animé de Lisbonne, Portugal


Aménités urbaines favorisant l’interaction – Denver, USA

Photo de couverture: quartier de proximité ou le lien social s’est renforcé, par le Carillon