Pour chacune des couleurs politiques, la mobilité se présente comme un enjeu environnemental. L’urgence écologique actuelle oblige à réfléchir à de nouvelles façons de se déplacer, moins polluantes et plus durables. Mais si le sujet a sa place légitime dans le débat électoral, on remarque dans certains programmes qu’il n’est que très peu abordé. Malgré tout, on distingue deux écoles bien distinctes entre les différents partis politiques.

La gratuité des transports est portée par la plupart des candidats de gauche, Philippe Poutou souhaite développer des transports 100% publics et gratuits tandis que Fabien Roussel ambitionne d’élever les transports collectifs urbains au rang de priorité de l’action publique et de les rendre gratuits, grâce à une augmentation du versement transport payé par les grandes entreprises. De son côté, Jean-Luc Mélenchon a porté sa stratégie sur les événements actuels et s’est saisi du sujet en promettant une gratuité des transports en commun pour tous tant que la crise des carburants persistera.

Plus de pouvoir d’achat pour les automobilistes ?

Le prix du carburant a atteint des sommets depuis le début de l’année, battant régulièrement son record établi la semaine précédente. Après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les prix ont flambé. Aujourd’hui, on assiste à une légère baisse avec des prix qui repassent sous le seuil des deux euros le litre, mais les inquiétudes sur le futur de nos déplacements en voiture persistent. Ces préoccupations sont au cœur du volet mobilité pour certains candidats aux présidentielles. L’une des rares propositions de Marine Le Pen sur la mobilité est notamment de redonner du pouvoir d’achat aux automobilistes, et plus largement aux citoyens, grâce à une réduction de la TVA sur les produits énergétiques en tant que biens de première nécessité, passant de 20% à 5,5% pour les carburants, fioul, gaz et électricité. Anne Hidalgo suit également la candidate du RN en proposant la même mesure mais seulement appliquée sur les carburants. Pour d’autres, comme Valérie Pécresse, il n’est pas question de toucher à cette TVA. La candidate LR considère en effet la mesure bien trop coûteuse pour les finances publiques, déjà trop endettées.

Mais aurons-nous toujours besoin de carburant pour nos voitures ?

En juillet dernier, la Commission européenne avait annoncé qu’elle soumettrait au Conseil de l’Europe une proposition d’interdiction de vente de tous les moteurs thermiques, y compris hybrides en 2035. Proposition qui a largement fait débat dans l’Union Européenne et qui a été reçue comme une gifle pour la France, qui militait pour exclure les hybrides de la réforme et étendre les délais jusqu’en 2040. Cette position, nous la retrouvons dans le débat électoral. Si, au contraire, pour le candidat d’Europe Écologie Les Verts, il est souhaitable que cette proposition soit effective dès 2030 en France, pour la majorité des autres candidats les délais sont trop rapides et ambitieux pour une telle transition. 

On observe un consensus sur le rejet du tout-électrique. La France Insoumise et le Rassemblement National s’accordent pour dire que le 100% électrique n’est pas la solution, qu’il faut laisser ses chances aux technologies à l’hydrogène décarboné. Pour la candidate des Républicains tout comme pour le candidat de la République En Marche, l’hybride et l’hybride rechargeable sont la solution immédiate qui permettrait de faire transition vers ce total électrique, bien que nous savons que cette hybridation énergétique n’est pas la solution parfaite. Conscients que l’investissement financier est, pour le moment, trop important pour une majorité des français, plusieurs candidats ont proposé des mesures facilitatrices à l’accession d’un véhicule électrique. Emmanuel Macron offre une prime de 1000 euros pour permettre à ceux qui ont un véhicule fabriqué avant 2001 d’acheter un véhicule plus propre. Alors que Anne Hidalgo mettrait en place un leasing social en partenariat avec des constructeurs et loueurs de véhicules, pour permettre aux particuliers d’avoir accès à un véhicule électrique pour un coût mensuel inférieur aux frais d’un véhicule à essence.

Le véhicule électrique n’est cependant pas envisagé par tous : du côté du parti Reconquête, le passage à l’électrique serait vécu comme une destruction d’un outil puissant et remarquable. Éric Zemmour, partisan de l’automobile, souhaite d’ailleurs alléger les restrictions qui pèsent sur le secteur et ses usagers, tout comme Nicolas Dupont-Aignan, qui lutte contre le harcèlement des automobilistes. Des combats à base de vitesse augmentée en ville et sur les routes départementales, de suppression de permis à points, de réduction du plafond d’amendes de stationnements et de suppression de restrictions de circulation liées à l’extension des zones à faibles émissions.

Et pour les mobilités douces ?

À l’encontre des mesures précédentes, M. Mélenchon et M.Jadot incitent à une “vélorution” et à réduire la dépendance à l’automobile par l’atténuation de la présence de la voiture dans les grandes agglomérations. Ce changement de modèle voudrait s’opérer par des réaménagements urbains pour accorder plus de places aux mobilités douces et inciter à leur utilisation. Dans son programme, Jean-Luc Mélenchon propose notamment de réaménager les routes départementales afin de les rendre plus sûres pour les cyclistes, de cofinancer des infrastructures cyclables et de stationnement vélo mais aussi de rendre obligatoire ces stationnements dans toutes les constructions et rénovations d’immeubles en ville et sur les lieux de travail. 

La mobilité douce est un intérêt national. Le vélo, en plus d’être écologique, est un moyen de déplacement en pleine croissance. La pandémie mondiale a engendré une nette augmentation de son utilisation, 28% de passages en plus dans les villes depuis 2019. Après le confinement, le regain du vélo a débouché sur la création d’infrastructures cyclables à un rythme stupéfiant dans les grandes villes. Les coronapistes, aménagées de façon tactique, se sont pérennisées, ce qui a considérablement amélioré la mobilité des cyclistes. Dans ce cadre, Yannick Jadot propose un fond d’investissement de 500 millions d’euros par an dédié au développement et à la sécurité des pistes cyclables mais aussi au prêt d’un vélo pour chaque jeune entre 16 et 25 ans. Par ce biais, on limite donc l’utilisation de la voiture et par conséquent sa dépendance.

Le milieu rural, plus dépendant à la voiture

La dépendance de l’automobile en ville est bien plus moindre qu’en milieu rural. En campagne, l’aménagement pour la mobilité douce, tout comme l’offre de transports collectifs, est quasi absente, ce qui contraint les habitants à emprunter leur véhicule. Peu de candidats se sont prononcés sur le sujet, même si Philippe Poutou et Jean Lassalle évoquent brièvement un désenclavement des campagnes par le transport. Cependant, l’objectif numéro un du volet mobilité du programme de notre actuel président est d’offrir une alternative à la voiture, pour permettre l’émancipation de tous par des déplacements libres. Étant donné qu’il faille bien souvent emprunter plusieurs modes de transport si l’on ne veut pas utiliser la voiture, le candidat propose de les connecter. Il a donc prévu de faire un appel à projets pour la construction d’infrastructures multimodales et pour la recherche de solutions intermodales par les agglomérations. Il souhaite également agir sur la mobilité des travailleurs en périphérie des villes, tout comme Nathalie Arthaud, en développant des aides pour permettre le retour de l’emploi. 

Finalement, sur la thématique des mobilités en ville, on remarque que peu abordent la mobilité dans tous ses modes. A droite, il s’agit surtout de répondre aux enjeux liés au secteur automobile, d’appuyer la transition vers des véhicules non thermiques et de faciliter leur accession. Tandis qu’à gauche, où l’on retrouve aussi des mesures sur ce sujet, on parle davantage de mobilité douce et de transports collectifs avec leur gratuité. Dans tous les cas, la dimension environnementale et écologique est abordée dans l’ensemble des couleurs politiques avec des degrés d’investissement et d’implication divergents selon chaque candidat. Pour en connaître davantage sur les mesures des candidats à propos de la mobilité, vous pouvez lire notre article Présidentielle 2022 : quelles mesures sur la mobilité ?