À Nice, le projet de forêt urbaine du maire LR Christian Estrosi, qui avait créé la surprise juste avant sa réélection, se concrétise. À Bordeaux, dans le cadre du plan de végétalisation, le maire EELV a inauguré le 9 mars dernier la première micro-forêt sur une place, et avait triplé fin 2020 le budget consacré aux plantations. On ne compte plus les villes qui ont – ou prétendent avoir – la main verte. Dans les petites villes comme dans les plus grandes, la liste est longue de tels projets étiquetés « forêts urbaines ».

Une question nouvelle et complexe

Qu’en pense Philippe Clergeau, écologue, spécialiste de la biodiversité urbaine et professeur au Muséum National d’Histoire Naturelle ? « Les forêts urbaines sont une question nouvelle qui partage les scientifiques. Aujourd’hui, la plupart des forêts urbaines sont plantées de façon très serrée afin d’avoir une forêt dense, les arbres du fait de la compétition ayant tendance à monter plus vite. L’intérêt est qu’il est possible d’accueillir un peu de faune, mais on manque de recul sur ces concentrations d’arbres. Le scientifique que je suis reste prudent : on peut planter une quinzaine d’espèces différentes et à la fin se retrouver avec seulement une ou deux espèces, devenues dominantes. »

L’enjeu de la surface, pour une véritable biodiversité

Philippe Clergeau ajoute : « Il y a aussi la question de la surface, très importante en écologie. Des villes, comme Paris et son projet “170 000 arbres”, aiment faire la course aux nombres d’arbres plantés. Très bien, mais sur quelles surfaces ? Pour avoir un écosystème, des relations entre les espèces, un sol riche, il faut disposer d’une surface minimale. Impossible lorsque les surfaces sont ridiculement petites. »

L’arbre qui cache la forêt du greenwashing ?

Les forêts urbaines sont un bon argument électoral. Qui n’a pas envie d’une forêt urbaine dans sa ville ? « Il faut faire attention à l’usage des termes pour « vendre » l’action d’une collectivité dans le sens de l’écologie. Difficile de parler d’une vraie forêt quand on plante quelques arbres au milieu du goudron, coupés de tout. Ma crainte est que les villes qui déclarent faire une pseudo forêt urbaine ainsi n’aient plus d’exigences sur ce qui pourrait être fait le jour où l’on devra adopter une véritable démarche en faveur de la biodiversité. » conclue-t-il. 

Philippe Clergeau nous a accordé un long entretien pour le dossier de cette semaine sur le thème de la biodiversité urbaine. Cliquez ici pour le lire !

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