Récemment, un spot publicitaire pour la célèbre My little box agitait la toile. Une jeune femme en petite robe noire et Stan Smith, danse et voltige au-dessus des toits. Un scénario surprenant composé par le webmagazine My Little Paris. Cette jeune femme surprend par la facilité et la grâce avec laquelle elle maîtrise les toits parisiens. Une danse urbaine qui étonne et fascine.
Au-delà du « petit buzz » que la vidéo a pu créer, le décor et l’imaginaire mis en avant, peuvent susciter une certaine interrogation. Comment est-on passé de l’image de toits urbains qui étaient considérés comme dangereux à celle des toits parisiens qui seraient glamours et « new cool » ? En somme comment est-on passé des Yamakasi à la Petite voltigeuse des Toits de Paris ? Ne faudrait-il pas y voir une certaine forme de gentrification virtuelle voire culturelle ?
Le phénomène de gentrification
La gentrification désigne un phénomène urbain par lequel les populations bourgeoises réinvestissent des quartiers anciens, longtemps abandonnés et marqués par une forte paupérisation. Cela passe par un rachat du parc immobilier. La gentrification d’un quartier est parfois définie comme un changement de la structure sociale, qui passe par une transformation spatiale et physique : on remet en état le parc de logements, le type de commerces change, de nouveaux bars ouvrent, etc. Or, quand on parle de gentrification, le phénomène ne passe pas uniquement par une transaction immobilière. Le phénomène d’appropriation n’est pas uniquement lié aux éléments matériels. Le concept de gentrification est beaucoup plus complexe et ces clips vidéo contribuent à nous le prouver.
Si beaucoup de jeunes femmes ont pu s’identifier à cette « voltigeuse », ce ne sont pourtant pas des pratiques usuelles ou quotidiennes. Mais il est clair que ce phénomène est révélateur d’une nouvelle forme d’urbanité. L’appropriation des « Toits de Paris » (aujourd’hui candidats pour un classement auprès de l’UNESCO) par cette jeune fille est significative de l’évolution de nos pratiques urbaines. Elle révèle une autre forme de gentrification. Celle d’une dimension immatérielle. Celle de la culture urbaine.
L’imaginaire des toits : une zone de l’interdit !
Plusieurs représentations collectives alimentent notre imaginaire du toit. Les doux souvenirs de notre enfance nous font voyager sur les toits parisiens du chat de gouttière O’maley. Ils nous rappellent l’émerveillement des petits chats de salon et de leur mère, Duchesse dans Les Aristochats. Mary Poppins nous faisait également découvrir un autre univers, en emmenant Jane et Michael à la rencontre des ramoneurs londoniens. Dans l’univers de Walt Disney se dessine une rencontre entre deux mondes. Une rencontre entre les riches et les pauvres. Entre les chats de gouttières et les chats de salon. Entre les enfants d’un employé de banque et des ramoneurs.
Dans d’autres films, le toit est une zone de fuite et de poursuite. Louis de Funès courant après Fantomas. Ou encore le commissaire Letellier à la poursuite de Minos dans Peur sur la ville. Le toit est un terrain dangereux. On s’y cache et on échappe aux menaces quand on en maîtrise la structure.
De manière générale, le toit est un espace urbain en marge. C’est un endroit qu’on a longtemps laissé à l’abri des regards du collectif. Ce sont les lieux de la ville dans lesquels on imagine que des activités douteuses s’y déroulent car elles sont à l’abri des regards. Les toits sont la cinquième face de l’immeuble, qu’on ne pratique pas. C’est un délaissé urbain qui laisse place à l’illicite et au potentiellement dangereux.
Les toits ne sont plus le lieu des « franges populaires » !
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