Le droit à la propriété privée, bien sauvegardé jusqu’à nos jours présente aujourd’hui quelques limites. Face à ce constat, quels sont les dysfonctionnements de la propriété privé et quel est l’intérêt de ces nouveaux mécanismes comme le foncier solidaire pour des villes plus inclusives ? Et quelles sont les autres initiatives positives qui fleurissent dans le monde et qui proposent de nouveaux modèles ?

La propriété privée est-elle un droit commun ou individuel ?

La propriété privée : un statut juridique complexe

La propriété privée est aujourd’hui reconnue socialement car elle est issue d’une conscience partagée de ce qui appartient à qui. Plus encore, elle est même socialement défendue par une instance juridique organisée, représentant le pouvoir, pour protéger le “chez soi”. En ce qui concerne la dimension marchande de la propriété, celle-ci existe depuis la naissance de la monnaie et se révèle aujourd’hui être un fondamental de l’époque moderne. Elle est même la condition de l’échange marchand puisqu’il n’est possible d’échanger qu’avec des biens qui nous appartiennent.

Dans le domaine juridique, notre système différencie trois types de propriété. La première est l’usus qui représente le droit d’usage du bien, la deuxième est le fructus faisant référence au droit de jouir pleinement de son bien et d’en récolter les fruits, comme le fait de percevoir un loyer, et la troisième est l’abusus donnant le droit de disposer du bien. Dans ce cas, le propriétaire peut réaliser tous les actes juridiques et matériels liés à son bien. Parmi ces actes, matériellement, il peut le détruire ou le dégrader, juridiquement, il peut céder ses droits d’usage à un tiers ou encore aliéner son bien, c’est à dire, le donner ou le vendre. C’est cette définition de la propriété qui importe dans le domaine juridique actuel.

Cette notion nous permet de faire la différence entre d’une part, la propriété des murs, par exemple du logement, et d’autre part, la propriété du foncier, c’est à dire du terrain où se trouve le logement. Essence de la propriété dans le droit, cette dernière donne le pouvoir au propriétaire de se défaire de son bien et aussi le droit de jouir durablement de l’endroit qu’il détient. Ainsi, lorsqu’il s’agit du foncier, aliéner librement ses biens pose une limite et peut révéler des abus, car cela donne le droit à une personne de posséder autant de terrains qu’il le souhaite. Or, cela peut mener à la spéculation immobilière, un phénomène qui exclut certaines populations.
De la propriété à la propriété privée

Dans la plupart des sociétés, le droit d’aliéner librement le foncier a été limité autant que possible. Ainsi, dans certains systèmes, la propriété était considérée comme du vol, c’est à dire comme l’appropriation de la nature par la violence ou par la force. Par exemple, dans le cercle de Gao où vivent les Touaregs et d’autres peuples nomades, l’organisation de l’usage des terres était convenu entre tribus, et il n’y avait pas de reconnaissance d’appropriation des terres qu’elle soit d’accès, d’exploitation ou de propriété, jusqu’à ce que les colons arrivent à la fin du 19e siècle. Ces derniers leur interdirent alors d’accéder à la vallée du fleuve, et s’y installèrent, ce qui modifiera profondément les pratiques foncières locales.
Campement temporaire des Touaregs


Campement temporaire des Touaregs ©wbwolfgang via Pixabay

Dans de nombreuses cultures, la propriété était une propriété collective et non individuelle, ce qui permettait à toutes les communautés et à tous les membres de la communauté de bénéficier d’un bout de terrain en tant que droit d’usus et fructus, et de s’assurer ainsi un abri et un moyen de subsistance. Pour ces communautés, le propriétaire n’a pas le droit d’abusus, soit de laisser son terrain sans usages ou de le vendre, car le foncier appartient à tous. Dans ce cas, c’est un processus collectif d’appropriation qui n’est pas décidé par un seul individu mais bien par la communauté.

Aujourd’hui, nous sommes passés d’une appropriation collective de la nature à une conception plus individualiste : la propriété au sens libéral. Dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, la propriété est d’ailleurs perçue comme un droit inviolable et sacré. Ainsi, lorsque les Touaregs ont refusé, par incompréhension, les titres de propriété qu’on leur proposait en 1950, ils ont perdu tous les droits de propriété sur les terres. Cet exemple interroge sur la nécessité de défendre la propriété privée lorsqu’elle concerne une acquisition unique “raisonnable”.

De même, si la propriété collective présente une organisation politique poussée à l’échelle locale, qui sous-tend de s’entendre avec son voisin pour se mettre d’accord sur les règles de distribution des terres, il s’avère que cette organisation se trouve limitée face à la pression foncière. Mais, alors, quelles solutions peuvent répondre à la crise actuelle du logement ? Serait-ce un équilibre idéal entre propriété privée, contrôle public et innovation ?

L’intervention des pouvoirs publics, la solution pour un habitat abordable pour tous ?

La propriété privée est nécessaire à chacun pour s’octroyer un refuge. Mais alors que la pression foncière est de plus en plus forte, comment garantir un foyer à chacun ? Les pouvoirs publics peuvent intervenir pour garantir ce droit au logement. Des collectivités mettent en place des mesures comme l’appropriation de la propriété pour une redistribution plus juste ou en valorisant l’accès à la propriété pour tous.

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Photo de couverture : Les terrains privés sont souvent signalisés ©aitoff via pixabay