Je crois que Paris respire.
Inspiration, expiration.
Aube, Crépuscule.

Les volutes de fumée s’échappent des persiennes et se mêlent au jour naissant.
Deux corps s’entrecroisent, s’enlacent et se délassent, font fuir la nuit et ses miasmes. Face à moi, l’immeuble Hausmannien projette son ombre sur les draps. Paris s’invite même entre les couples d’une nuit.

Lune éclatante, poursuis ta course folle par-dessus les toits, et vrille donc d’éclairs bleutés les bouches affamées.
L’astre se reflète dans la Seine, froid et tremblant. Je voudrais apprendre dans les tréfonds insondables du fleuve la solution limpides de nos déboires adulescents. Seine de chagrin, porteuse des vies croisées et emportées au détour d’un pavé, emprisonnant l’emprunte d’un rouge à lèvre sur une cigarette, distillant un rire, ou le monologue d’un soupir. En flux continu, il happe ces minutes parisiennes dans son sombre manteau, pour les recracher ensuite gueule béante.

Une porte claque, un moteur se met en marche. Dans la ruelle, les citadins reprennent leurs droits sur les tentacules nocturnes de la cité. Bientôt, la torpeur moite d’une nuit épaisse laissera sa place à la lumière et au jour frénétique.
Lumières de la ville, lumières de nos vies. Elles s’étendent à nos pieds, Grande Ours ou fil d’Ariane brumeux, pointillés lumineux. Elles sont ici puis là bas, invisibles et explicites, extrapolées et évidentes. Ces fenêtres allumées que j’aperçois le temps d’un trajet sur la ligne 2, lorsque le métropolitain sort de son antre pour faire la nique aux étoiles; lumières naissantes, s’éteignant subrepticement parmi leurs grandes soeurs parisiennes.

Les respirations des habitants encore endormis rythment la lente émergence de la ville. Un, deux, trois, ils entameront leur valse quotidienne. Un, deux, trois, ils tenteront de ne pas manquer les temps forts d’une danse à 11 millions… en comptant les agglomérations.

La valse s’est tue, l’orchestre a joué sa dernière note, les réverbères s’éteignent et accompagnent la nuit qui regagne son antre fluviale, pour ne ressortir qu’au crépuscule.

Le jour se lève.

Écrit au Rivolux. Paris IVeme