Ce projet s’ancre dans une volonté politique de la commune de valoriser une ville « verte et agricole », agréable à vivre et résiliente. La municipalité de Saint-Denis a ainsi répondu à l’appel à projets « Quartier Fertiles » afin d’impulser une initiative d’agriculture urbaine sur son territoire. Plus précisément, il s’agit pour elle de profiter des espaces rendus disponibles par l’aménagement du PRUNEL (Projet de Renouvellement Urbain Nord Est Littoral) pour y insérer une production locale et solidaire. 

Le projet comporte trois volets : une micro-ferme urbaine maraîchère dans un parking souterrain , la mise en place de jardins collectifs en pied d’immeuble, ainsi qu’un rucher pédagogique. 

Ce dernier ambitionne, via une production qui sera vendue aux écoles et associations, de sensibiliser les résidents au rôle central des pollinisateurs dans le maintien de la biodiversité. Il a également une visée sociale puisqu’il entend, en étant situé près d’écoles, apporter des activités ludiques et en extérieur aux enfants de Seine Saint Denis. 

Si cette initiative est tout à fait louable, certains experts en nuancent l’efficacité. En effet, la venue des abeilles en ville, et notamment sur les toits, trouve son origine dans l’utilisation intensive des pesticides en milieux ruraux. On comptait ainsi près de mille ruches à Paris en 2018, et une étude menée par Isabelle Dajoz démontre les effets pervers et contre-intuitifs qui résultent de ce phénomène. 

Après trois ans d’analyse dans la capitale, elle a démontré que l’abeille domestique a pris une place écrasante sur sa congénère sauvage. Les premières consomment l’ensemble des ressources, empêchant l’abeille sauvage de perdurer et créant ainsi une forme de concurrence déloyale. Le chercheur Vincent Dietemann, quant à lui, explique que «toutes les abeilles sauvages confondues sont responsables de 50% de la valeur économique du service de pollinisation des cultures, donc autant que l’abeille domestique à elle seule. Pourtant, on ne leur accorde pas assez d’importance dans la recherche. La domestique est plus généraliste et moins coûteuse à favoriser, ce qui explique la focalisation sur cette espèce.»

Ainsi, pour le spécialiste, le rucher urbain a tendance à devenir un effet de mode, et la plantation de fleurs sauvages et d’arbustes indigènes reste une option plus avantageuse à prendre en compte pour les pollinisatrices. L’éco parc des carrières à Fontenay-sous-Bois illustre ce propos : en effet, la gestion différenciée du site ainsi que les hôtels à insectes qui y sont présents (notamment pour les abeilles sauvages) permettent de créer des zones refuge pour la faune et la flore.  

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